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Le père Frechet : 10 ans déjà

Le quotidien Le Dauphine Libéré vient de publier plusieurs articles à l’occasion des 10 ans de la mort du père Frechet, fondateur de l’association Saint Paul qui deviendra par la suite Le Habert.

Nous reproduisons ci dessous l’article consacré au père Fréchet:

Si les Grenoblois n’ont pas tous connu le père Fréchet, ils sont toutefois nombreux à avoir entendu parler de « l’abbé Pierre de Grenoble ». Dans son église Saint-Paul, il accueillait tous les « cabossés de la vie », comme il les appelait. Dix ans après sa mort, le souvenir est vivace.

Chez  tous, la même admiration, et le même manque. « Le père Fréchet, on ne peut pas l’oublier » dit son ancienne assistante. Qui ne souhaite pas que son nom apparaisse, car « l’important, c’est lui».

Lui, qui aura durablement marqué le quartier des Alliés, depuis son arrivée, en 1962, à l’église Saint-Paul. « Pendant plus de 45 ans, il aura lutté, combattu. C’était un homme de foi, d’évangile, mais aussi un homme d’action. Un homme debout ». Dès sa prise de fonction à Grenoble, celui qui revenait juste d’une traumatisante guerre d’Algérie aura choisi d’agir. « Il était harcelé, du matin au soir, par des personnes en difficulté de logement, de nourriture, de papiers. Il recevait même le week-end. Tout cela en continuant à faire vivre l’église : ses messes du dimanche étaient pleines de monde ! ».

Une action soutenue

Des caravanes disséminées aux alentours de l’église, des distributions  alimentaires au sous-sol, un « restaurant social » au 51, rue de Stalingrad, des hébergements dans des appartements et hôtels, une polyclinique au Pérou :’le père Fréchet faisait feu de tout bois. « Il aura pris tous les risques », dit son assistante. Une implication qui a rapidement ému les responsables politiques du territoire : d’Hubert  Dubedout à  Michel Destot, les soutiens à son action n’ont pas manqué. « Il était en lien avec le préfet, le maire, la police. Tous étaient conscients qu’il faisait un travail essentiel ». Un travail, disait-il d’ailleurs, « qui aurait dû être assuré par les institutions ». Mais ce n’était pas le cas, pas assez du moins. Alors, ceux que le système rejetait  venaient toquer à sa porte. « Des personnes en marge de la société, dont personne ne voulait », résument les membres de son équipe.

« Il parlait, on l’écoutait »

À Saint-Paul, le travail n’était pas de tout repos : « Il y avait beaucoup de violence. Le père recevait des écorchés vifs, des personnes pas toujours gentilles, des gens accros à la drogue ou à l’alcool ». Autant de situations qui auraient pu dégénérer. Sauf que la personnalité de Jean Fréchet désamorçait beaucoup de tensions. « Il avait la grâce, il était très estimé. Quand il parlait; on l’écoutait ». Et puis, il était entouré de ceux qu’il appelait « ses  gars », un groupe d’hommes prêts à tout pour l’aider. Souvent des anciens « cabossés », qu’il avait su écouter. Et qui le lui rendaient bien. Des « gais » qui, eux-mêmes, pouvaient s’appuyer sur l’action d’environ 70 bénévoles dévoués.

Pendant plusieurs décennies, l’action menée à Saint-Paul aura permis de sauver des centaines de personnes. « À cette époque, peu de bénéficiaires sont restés sur le carreau. Le père avait toujours une solution. C’était une personnalité qui comptait beaucoup à Grenoble, et son réseau était vaste».

Fondateur de l’association. Saint-Paul, qu’il gérait en parallèle à sa paroisse, le père Fréchet ne supportait visiblement pas l’inaction. En marge de son quotidien grenoblois, il aura donc soutenu le développement de la ville d’Arequipa, au Pérou. « Il avait rencontré un étudiant péruvien, Mauricio, lui avait payé ses études, et quand il est devenu médecin, il lui a dit de rentrer là-bas, qu’il l’aiderait».  La polyclinique a ouvert en 1990. Le père a initié des consultations dans les bidonvilles, des soins gratuits à la population, l’ouverture d’une cantine, des campagnes de santé. « Ensuite, une école, deux crèches, une réserve d’eau potable… ».

Malade, le père Fréchet a vécu ses derniers mois en maison de repos. Il s’est éteint le 17 mars 2011, à 75 ans. Dans son dernier livre (il en a publié beaucoup), il écrivait : « 45 ans de lutte contre la misère et l’exclusion m’ont tué. Petit à petit, j’ai tout perdu : ma vie, ma santé, mes forces, mon argent. Je suis ruiné. Mais j’ai peut-être tout gagné désormais je suis libre, el j’ai gagné la foi ».

Isabelle CALENDRE

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